ITINÉRAIRE PLASTIQUE - 1963

APPROCHE D'UN LANGAGE SPÉCIFIQUE
ALBERT AYME - FRANCIS PONGE Edition TRAVERSIÈRE 40 pages, format 28x23 cm
préface de Francis Ponge
fac-similé d'une lettre de Francis Ponge
20 illustrations noir & blanc
Troisième édition
13 € : COMMANDER

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Ces 3 phases de travail de l'année 1962, par leurs découvertes primordiales, ouvrent les prémisses de toute l'œuvre future du peintre. Depuis 1963, ce texte est continuellement en diffusion. L'édition originale est totalement épuisée. L'édition de 1979, avec une postface de Gérard-Georges Lemaire, également. L'édition actuelle de 1990 est disponible.

Préface de Francis Ponge :

Depuis que je connais Albert Ayme, mon estime et ma sympathie n'ont fait que croître et je puis parler maintenant, sans pour cela élever le ton, d'enthousiasme et d'admiration.

Il est parfaitement exceptionnel de rencontrer un artiste assez sûr de ses ressources pour s'occuper exclusivement de mettre au point le langage qui lui permette de les écouler toutes, sans manque, sans faute, sans la moindre compromission non plus.

Albert Ayme en est à ce point, et il raconte sa démarche comme seul il pouvait le faire, bien sûr. La seule chose, de ma part, utile à ajouter, me paraît celle-ci : à chaque instant de cette recherche les œuvres qui en ont résulté ("calmes blocs ici-bas") sont telles qu'elles auraient pu, s'il avait consenti à les montrer, par leur rigueur mais aussi bien par leur charme, lui valoir l'adhésion immédiate des amateurs.

La perfection, parfois, s'obtient peut-être - je me suis un jour laissé allé à le dire - par violence faite à la manie de la perfection. Quoiqu'il en soit, vous avez eu raison, j'en suis persuadé, cher Albert Ayme, d'avoir fait une fois violence à votre pudeur, et tenté d'accéder au public de plain-pied. Bonne Chance ! Francis PONGE, 1963

Extraits du texte d'Albert AYME :

L'art est une mise en œuvre des nécessités de l'esprit en termes conformes aux capacités intrinsèques du matériau plastique. Par matériau, nous entendons cristallisation, sous une forme native, de la matière informe, selon un ordre, une loi intrinsèques…

1° - Les "Aquarelles Monochromatiques" vers une morphogenèse autonome. Au principe de juxtaposition formelle impliquant la tutelle de la subjectivité et la primauté du choix, je substitue un principe de superposition transparente, soit plus précisément une polymorphie de structures monochromes… fruit d'un seul élan qui supprime tout retour en arrière et tout repentir… Les formes nouvelles écloses de la superposition, l'émotion sans antécédent qui se dégage de leur cristallisation finale, sa poétique enfin, correspondent à une démarche dans le temps… conquis, immobilisé, solidifié grâce à sa concentration en un point.

2° - Les "Reliefs Soustractifs", auto-phanie des signes. Une œuvre d'art nous informe comme une vivisection… Les œuvres incisées sont le produit d'un seul effort irréversible. Elles sont issues d'une superposition soustractive… Captant simultanément ses deux aspects complémentaires --composantes morphologiques et graphiques-- déclenchent un phénomène de synesthésie visuelle. Double événement surgi d'un acte unique, ces composantes s'éclairent synoptiquement, situées et datées, dans leur topographie et leur chronologie propres.

3° - Les Draps muraux, Frises murales (Toiles Libres). …Un langage nouveau dont l'énergie interne, pour se développer, exigeait sa vérité dans l'espace… Créer, au moyen d'une écriture contrapunctique, des œuvres à la fois ouvertes et finies… La Frise est conçue comme un chant poétique… Création d'un plan pictural absolu grâce à des moyens a-valoristes (utilisation des extrêmes : le noir et le blanc) l'écriture des Frises est appropriée à une lecture simultanée de leurs structures - "dialogue sans fin"… 6 mètres 60, toile sans châssis. 1962.

Révélateur des synthèses vitales reconverties au niveau de la création poétique, tout acte créateur est voué à surprendre et à fixer un événement poétique au terme d'opérations complexes, presque magiques… dosage rigoureux et savant de l'intuition et de l'intellect. A.A. avril 62-avril 63

LA RÉÉDITION DE 1979 ÉTAIT AUGMENTÉE D'UNE POSTFACE DE GÉRARD-GEORGES LEMAIRE

Postface de Gérard-Georges LEMAIRE :

EN CONTINUUM. L'IN(DÉ)CISION-MOUVEMENT. D'UN BLANC-SECCO. LA FRESQUE-NON STOP. LE PARADIGME-NON FINITO.

La modernité en art ne serait-elle justement pas l'exacerbation des contradictions qui la fonde ? A cet égard, les œuvres d'Albert Ayme sont exemplaires. Elles ont été prises par une compulsion de rationalité. Pourtant, au bout du compte, leur rigueur et leur algèbre n'ont eu pour effet que de rendre plus douloureusement sensibles les points de suture qui tiennent la toile tendue…

Les Reliefs Soustractifs, à rebours de Hans Arp, soulèvent, strate après strate, la pellicule d'un corps blanc… Déplacement du geste sur l'aplat de la surface pour en inventer une profondeur… L'œuvre soustraite est désormais la proie du temps… Le blanc n'existe que saturé de sens. Il est le lieu d'un renversement. Et il est l'unimité d'une aporie…

La Fresque est l'emboîtement des temps forts d'une fiction… Une construction autre que celle qui enferme la toile dans son cadre. C'est, dans le cas des Draps Muraux, la mise dos au mur de la peinture… Les Frises d'Albert Ayme (ces toiles sans châssis de quelques 6 ou 7 mètres de long), avec leurs découpes au pochoir et la scansion comme partition d'une gestuelle, sont la réminiscence des formes taillées à vif dans la couleur par Henri Matisse - mais une réminiscence qui se réalise dans la vitesse d'une poétique - sismographie d'une relation qui joue sur les recoupements, les recouvrements et les espacements des figures… G-G.L. 1978 - Écrivain, critique d'art

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